Il y a une bête en gestation dans ma tête.
Comme une femme enceinte, ça faisait un moment que je savais que quelque chose était là, même si rien ou presque ne le laissait supposer.
Et puis ça a grossi. Et il est maintenant impossible de me le cacher à moi-même.
Ses membres prennent forme. Je commence à deviner son allure générale. Je devine sa silhouette qui grouille cellulairement, qui enfle de l'intérieur, qui lance des excroissances autour d'elle comme de la dentelle de chair. Ce n'est pas humain.
Il y a des projets d'écriture plus vivaces que d'autres, certains qui sont comme de gros chats assoupis qu'on prend parfois sur ses genoux pour les caresser avant d'être appelé par d'autres impératifs. Et il y a ces maladies, ces parasites qui se nourrissent de nos pensées, de nos craintes, de nos espoirs, pour les tordre et produire de la matière palpitante. Une fois installé, accrochés en vous, il ne peut plus y avoir d'autres impératifs. On sait que dès lors, cette chose continuera à grossir anarchiquement, avec d'autant plus de ferveur quand vous regarderez ailleurs et chercherez à nier votre condition. Des volcans animaux en éruption d'énigmes. Des foetus bouillonnants portant en eux d'autres foetus bouillonnants. Et vous êtes habités. Vous êtes l'hôte. Comme dans un roman de Clark Ashton Smith où le végétal peut être possédé par un démon, c'est le végétal qui en vous devient le démon. Une plante bactériologique démoniaque vous possède. Pourquoi n'y aurait-il pas de démon à forme végétale ? Pourquoi les diables auraient-ils tous une apparence humaine ? Cette chose qui pousse en vous semble bien être tout ça. Et bien vite, il vous faudra mettre tout en oeuvre pour vous en débarrasser.
Ce sera une douloureuse jouissance qui vous occupera plusieurs années.
Je passe ma main sur ma peau imaginaire gonflée par l'infection. Bientôt, je ne pourrai plus attendre. Il faudra que j'écrive.
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| publié le 08 novembre 2016 à 09 h 46
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